Il était une fois un héros, Matoub Lounès

06Nov13

Il était une fois, Matoub Lounès.

1956-1998.

Chanteur, poète, musicien, érudit mais aussi rebelle, combattant, militant de la cause identitaire et voix du peuple, Matoub Lounès est le grand frère de l’Algérie et de sa région, la Kabylie.

Né à vingt kilomètres de Tizi Ouzou, Matoub apparaît dès son enfance comme un enfant intelligent et instinctif.

A l’âge de 9 ans, il fabrique sa première guitare avec des objets de récupération et compose ses premières chansons.

Il débarque en France en 1975. Il se fait un nom dans les cafés parisiens au sein du milieu kabyle.

Sa rencontre avec le chanteur Idir marque un tournant dans sa carrière. Lounès enregistre son premier disque et le triomphe est immédiat. Fidèle à lui-même, il s’engage pour la reconnaissance de la langue kabyle et revendique son identité en évitant toute appartenance à un quelconque parti politique. Il représente sa propre pensée, guidée par sa clairvoyance et son amour sincère pour son pays.

Poursuivant sa carrière de chanteur, il fait salle comble à l’Olympia en 1980. Il est reconnu pour ses textes forts et la finesse de ses chansons. Lors de ce concert mémorable, il est vêtu d’une tenue militaire pour manifester son soutien aux militants kabyles. Il refuse toute forme d’oppression et se bat pour la liberté de son peuple.

En 1994 il reçoit le Prix de la Mémoire de la part de Danièle Mitterand pour son ouvrage autobiographique Le Rebelle. La même année on lui remet le Prix de la Liberté d’Expression au Canada.

Sa quête de la justice se témoigne notamment en 1995, lors de la Marche des Rameaux en Italie pour l’abolition de la peine de mort. Il prononce un discours remarquable contre l’injustice et la violence.

Matoub a lourdement payé son courage. Dénonçant la manipulation politique et la corruption, il est blessé par un policier en 1988, séquestré par le GIA en 1994. Son enlèvement bouleverse la Kabylie et l’opinion publique qui se mobilise, ce qui lui vaut d’être relâché.

Lounès s’oppose à la politique d’arabisation de l’Algérie. Il n’a jamais renoncé.

Il s’est battu durant toute sa carrière pour préserver l’identité sous toutes ses formes, pour le patrimoine culturel laissé par les ancêtres, pour le droit de parler sa langue maternelle et de conserver les richesses de sa région. Son talent a rassemblé des millions d’algériens et de français.

Matoub Lounès est assassiné le 25 juin 1998 sur une route de Kabylie. Les conditions de sa mort restent non élucidées.

Sa maison en Kabylie est transformée en musée et de nombreuses rues portent son nom en France et en Algérie.

En 2001, le groupe corse Canta u Populu Corsu rend hommage à sa lutte et ses souffrances dans l’album Rinvivisce.

Aujourd’hui encore, son nom évoque celui d’un héros. Son combat est entré dans la légende.

 » A nerrez wala a neknu » (Plutôt rompre que plier)

Matoub Lounès, très aimé et soutenu par son public. Son œuvre est composée de 28 albums.

Hommage à Lounès Matoub à Montréal

« Je me méfie de toute force de pouvoir et d’autorité. Je n’accorde rien à aucune forme de pouvoir. »

1994, la Sorbone. Danièle Mitterand lui remet le Prix de la Mémoire. Sa simplicité frappe l’assemblée.

Matoub, la liberté ou la mort.

« Ce qu’ils m’ont reproché, c’est d’être libre penseur, de rejeter la dictature arabo-islamique, de revendiquer mon identité berbère, antérieure à l’arabo-islamisme. Ce qu’ils m’ont reproché aussi, c’est de chanter l’antique esprit de résistance, celui de la reine Kahina qui s’est opposée à la première invasion arabe.

Kahina, Massinissa, Jugurtha sont autant de noms qui sont aujourd’hui bannis de l’histoire officielle comme de celle des intégristes.
Car tous les dictateurs qui veulent s’approprier l’Algérie, commencent par la façonner pour la dominer. Et le premier acte, c’est d’effacer la mémoire du pays, c’est à dire son histoire.

Les figures emblématiques de notre antiquité résonnent comme autant de dénonciations de cette imposture. »

Lounès Matoub  6 décembre 1994, Paris.



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